F.-X. Putallaz - Le libre arbitre n'est pas la liberté

  • La liberté est une propriété de la volonté qui se porte vers ce qui est meil­leur

Avec l’expression « iudicium liberum », on saisit mieux le sens du terme « libre arbitre » : il ne s’agit pas de la liberté, laquelle est une propriété de la volonté qui se porte vers ce qui est meil­leur, mais de la « liberté de choix », c’est-à-dire du juge­ment libre qui oriente l’action. La question [I, 83,] 3 sera donc très délicate : le libre arbitre, qui est cette faculté de choisir en raison d’un jugement ouvert à une pluralité d’objets, ne serait-il pas une faculté cognitive plutôt qu’une faculté appétitive ? N’est-il pas de l’ordre du jugement plutôt que de la volonté ? En démontrant que le libre arbitre n’est rien d’autre que le mode d’exercice de la volonté humaine, Thomas montre que la raison est seulement à la racine du libre arbitre, aucunement à l’origine de la volonté et de son élan foncier. (L'Âme humaine, p. 565, n. 240)

Liberté, Raison, Libre arbitre, Volonté, Moyen

F.-X. Putallaz - Sur la liberté chez Sartre

On comprend l’erreur qu’il y aurait à soutenir, avec Jean-Paul Sartre, que « l’homme est sa liberté ». Pour « être sa liberté », c’est-à-dire pour choisir son essence, il faudrait que la réalité humaine (on ne dit même plus « l’homme ») ne fut rien, afin qu’elle puisse devenir tout : il ne doit pas y avoir de « nature humaine », puisque toute nature porterait un coup fatal à l’absolue liberté. 

Cette conception existentialiste induit des conséquences considérables, dont la moindre n’est certainement pas la conviction partagée par Simone de Beauvoir selon laquelle « on ne naît pas femme, on le devient », avec ses innombrables ramifications dans certaines théories du genre, lesquelles voient dans la nature un obstacle à la liberté ou au libre choix. (L'Âme humaine, p. 722)

Nature humaine, Liberté, Sartre, Existentialisme

F.-X. Putallaz - Qu'est ce que l'appétit ?

Le terme « appétit » est composé du radical « petere », qui signifie « rechercher, réclamer, aspirer à ». Dans une « péti­tion », on effectue une requête pour réclamer quelque chose ; une force « centri-pète   « tend vers » le centre.

Quant au préfixe « ad- », il indique le mouvement, la direction vers laquelle il s’oriente. « Ad-petere » signifie donc « tendre-vers » de manière dynamique, « aspirer- à », « être-enclin-à » : l’appétit est cette tendance inscrite au fond d’une chose, substance ou faculté, une inclination à rejoindre la fin qui la perfectionne et le bien auquel elle aspire. Si maintenant on cherche à traduire en français le terme « appetitus » par d’autres termes que « appétit », ou bien on en réduit la portée (le « désir » par exemple n’est qu’une passion de la « désirative », ce qui est trop étroit), ou bien on l’élargit exagérément (comme avec le terme « tendance » ou « inclination »). Mieux vaut donc conserver le français calqué sur le latin, et utiliser les termes « appétit », « puissances appétitives », « appétit sensible » ou encore « appétit intellectif ».

L’appétit est donc une tendance interne à chaque chose qui l’incline vers sa perfection et la dirige vers la finalité correspondante. Aussi cette inclination est-elle univer­selle, diversifiée selon les choses, mais dynamisant la totalité des créatures. C’est ce qu’on appelle un « appétit naturel » : par nature, une chose tend à sa propre perfection. Il se trouve donc une tendance inviscérée en toute chose, une inclination ontologique au bien qui lui convient. Cet appétit est fonction de la « forme » propre à chaque espèce de choses. etc. (L'âme humaine, pp. 713-714)

Inclination, Appétit